Sens et Vie

Que signifie "Etre vraiment soi-même" ?

« Etre vraiment soi-même Â» , les buts personnels vus par un thérapeute.

 

« Quel est mon but dans la vie ? Â» « Où tendent mes efforts ? Â» « Qu’est-ce que je cherche à atteindre ? Â». Ce sont là des questions que tout homme se pose à un moment où l’autre.

 

Je crois que la meilleure façon d’exposer ce but de la vie, tel que je le vois dans mes rapports avec mes clients , est d’employer les mots de Soeren Kirkegaard : « Etre vraiment soi-même Â».

 

Par-delà les façades.

 

J’observe tout d’abord que le client tend à s’éloigner d’un soi qu’il n’est pas. Autrement dit, même sans savoir exactement vers quoi il tend, il s’éloigne de quelque chose. Et ainsi il commence à définir, négativement, ce qu’il est. Au lieu d’être simplement une façade, comme s’il n’était que cela, il devient de plus en plus lui-même.

 

Par-delà les « je devrais Â».

 

Nous retrouvons une tendance du même genre chez le client qui s’écarte de l’image contraignante de ce qu’il « devrait être Â». Certains individus ont été si profondément imprégnés par leurs parents de l’idée : « je devrais être gentil Â» ou « il faut que je sois gentil Â», que seul le plus pénible des combats intérieurs peut les en écarter.

Un certain nombre d’individus, assez curieusement, s’aperçoivent qu’ils se sont sentis obligés de se considérer comme mauvais et se rendent compte que c’est de cette conception d’eux-mêmes qu’ils s’éloignent.

 

Par-delà ce qu’on attend de vous.

 

D’autres clients s’éloignent de ce que la culture attend d’eux (par exemple les normes sociales).

A l’encontre de ces pressions en faveur du conformisme, je constate que les clients, laissés libres d’être vraiment eux-mêmes, s’irritent et se mettent à douter de cette tendance – propre à la culture, ou à différents groupes sociaux – qui est de les adapter à toutes les situations données. Un de mes clients me dit avec emportement : « J’ai si souvent tâché de me conformer à ce qui avait du sens pour les autres et n’avait en fait aucun sens pour moi. Â»

 

Par-delà le devoir de faire plaisir aux autres.

 

Je constate que beaucoup d’individus se sont formés en essayant de plaire à autrui, mais qu’une fois libres, ils changent. Un homme, de profession libérale, écrit : « J’ai finalement senti que je devais tout simplement me mettre à faire ce que j’avais envie de faire, non ce que je jugeais avoir à faire, et sans me soucier de l’opinion d’autrui. Je m’étais toujours senti obligé de faire certaines choses, parce qu’on s’attendait à ce que je les fasse, ou, qui plus est, pour m’attirer l’amitié d’autrui. A partir de maintenant, je crois que je serai tout simplement moi-même. Â»

 

Ainsi on peut dire que, de façon quelque peu négative, les clients définissent leur but en découvrant quelques unes des directions qu’ils souhaitent ne pas prendre. Ils ne veulent pas être ce qu’ils devraient être, que cet impératif leur vienne de leurs parents ou de la culture. Ils ne veulent pas s’imposer une conduite uniquement pour le bon plaisir d’autrui. En d’autres termes, ils se refusent à être quoi que ce soit d’artificiel, d’imposé ou de défini de l’extérieur. Ils se rendent compte que de tels buts n’ont aucune valeur pour eux, même s’ils ont vécu en fonction d’eux, auparavant.

 

Mais quelles sont alors les directions qu’ils prennent ?

 

Vers l’autodirection.

 

Tout d’abord, le client se dirige vers l’autonomie. Je veux dire par là qu’il se choisit progressivement les buts qu’il désire personnellement atteindre. Il devient responsable de lui-même. Il décide des activités et des comportements qui pour lui ont un sens, et il renonce à ceux qui n’en ont pas.

 

Vers la mobilité, le processus.

 

Certains clients semblent tendre plus ouvertement vers un processus, une fluidité, un changement. Ils ne s’inquiètent nullement du fait qu’ils changent d’un jour à l’autre, que leurs sentiments changent eux aussi, et qu’ils n’ont pas toujours une conduite conséquente. Ils sont pris dans un courant et semblent se complaire à suive ce courant.

La direction que prennent les clients est vers un processus de potentialités naissantes, plutôt que vers l’être ou le devenir de quelque but fixé d’avance.

 

Vers la complexité.

 

Le désir d’être entièrement soi même, à chaque instant, dans toute sa richesse et sa complexité, sans rien se cacher et sans rien craindre de soi-même, est un désir commun à ceux qui se sont montrés très actifs au cours de leur traitement. L’une des tendances les plus évidentes chez les clients les porte à assumer toute la complexité et la fluidité de leur être à chaque moment important.

 

Vers une ouverture à l’expérience.

 

L’une des composantes est la tendance de l’individu à vivre en relation ouverte, amicale et étroite avec sa propre expérience.

Souvent, quand le client découvre quelque nouvelle facette de lui-même, il la rejette tout d’abord.

Cependant, dans un climat d’acceptation, les clients apprennent peu à peu que leurs expérience n’ont rien d’hostile ni d’effrayant. Ils en viennent à comprendre que leurs réactions et leurs expériences intérieures, les messages de leurs sens et de leurs viscères sont amicaux. Et ils désirent se rapprocher de ces sources internes d’information plutôt que de se fermer à elles.

 

Vers une acceptation d’autrui.

 

Au fur et à mesure qu’il peut accepter sa propre expérience, le client tend aussi à accepter l’expérience d’autrui. Il évalue et juge sa propre expérience comme celle d’autrui pour ce qu’elles sont. Comme les enfants qui ne critiquent pas l’humidité de l’eau ou la dureté de la pierre, mais se contentent d’observer et de noter ce qui se passe, sans raisonner et sans exiger qu’il en soit autrement, les clients observent la nature humaine en eux et dans les autres.

 

 

Vers la confiance en soi.

 

Progressivement le client s’apprécie et acquiert plus de confiance en soi.

J’ai vu plusieurs fois, parmi mes clients, des gens simples acquérir de l’importance et une puissance créatrice dans leur sphère propre, au fur et à mesure qu’ils prenaient plus de confiance en eux et osaient avoir leurs sentiments propres, vivre selon les valeurs qu’ils découvraient intérieurement et s’exprimer à leur façon, unique et personnelle.

 

La direction générale.

 

En bref, le schéma du mouvement observé chez mes clients, semble vouloir dire que l’individu se dispose à être, en toute connaissance de cause, le processus qu’il est véritablement en profondeur. Il renonce à être ce qu’il n’est pas, à être une façade. Il n’essaie pas d’être plus qu’il n’est avec toute l’insécurité que cela entraîne. Il n’essaie pas d’être moins qu’il n’est, avec les sentiments de culpabilité et de dépréciation que cela implique. Il est de plus en plus attentif à ce qui se passe dans les profondeurs de son être physiologique et émotif et se trouve de plus en plus enclin à être, avec toujours plus de précision et de profondeur, ce qu’il est le plus véritablement.

 

Etre pleinement soi-même en  tant qu’être humain est un processus qui, à mon avis, ne peut être qualifié de mauvais. Il est plus juste de dire que c’est un processus positif, constructif, réaliste et digne de confiance.

 

(Carl Rogers « Le développement de la personne Â» citations libres, p. 113 à 124)

 

 

 

 



05/12/2008
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