Faire travailler le groupe, comment ?
Faire travailler le groupe, comment ?
Dans la mesure où l’on a authentiquement l’intention de « faire travailler le groupe » et donc d’utiliser son dynamisme latent, l’essentiel devient, pour le responsable, de susciter et d’entretenir la participation des membres du groupe. S’il prend seul la parole et use de son statut d’autorité pour suggérer des idées (les siennes) au groupe, il bloque et interdit pratiquement la participation, ou n’obtient qu’une participation limitée à des interventions individuelles, mais jamais d’interactions. A cause de cela, on est arrivé à la notion de non directivité. Cela signifie : le conducteur du groupe ne doit pas intervenir sur le fond, ne doit pas donner ses idées ni ses opinions personnelles, il doit seulement veiller à susciter, organiser et « réguler » la participation des membres. Dans cette perspective, diriger le groupe ne signifie pas l’entraîner derrière soi vers des idées qui nous sont chères, mais avoir la maîtrise des forces considérables qui sont en puissance dans le groupe, les utiliser et leur faire produire leur optimum.
Cette définition exclut de toute évidence le laisser-faire. La non-directivité, entendue comme non-interventionnisme sur le contenu et régulation active du groupe (pour éveiller, contrôler et utiliser son dynamisme) est une attitude à la fois difficile et efficace, exigeant compétence, entraînement et connaissance de la Dynamique des groupes.
Le rôle et les techniques de l’animateur.
D’abord et avant tout, deux grandes opérations permanentes :
La reformulation des opinions individuelles, opération qui facilite l’expression (démontre l’accueil intégral de la part de l’animateur), oblige les autres à écouter les idées émises, stimule les interactions.
La synthèse, opération également fondamentale qui se fait à tous les niveaux : reformulation synthèse d’une intervention un peu longue, synthèse entre deux ou plusieurs opinions, synthèse par phase, synthèse partielle par point du plan, synthèse finale.
D’autre part, un ensemble de procédés d’animation :
- La question clarification. Elle a pour but de faire définir une idée que, visiblement, les participants interprètent dans des acceptations différentes. Elle est utilisée aussi pour faire définir un mot inconnu, une allusion obscure, ou pour faire clarifier une intervention embrouillée et dont le sens n’est pas clair.
- L’appel direct à participation. Utilisé pour faire parler un silencieux après un certain temps (ne pas brusquer et ne pas insister la première fois) ou un participant qui, par sa mimique, manifeste son désir d’intervenir.
- La question-écho. La question posée par un participant à l’animateur est renvoyée à ce participant par l’animateur sous la même forme en lui demandant de donner sa propre réponse.
- La question-relais, la question miroir. L’animateur renvoie la question posée, mais à un autre participant ou à l’ensemble du groupe. La question relance consiste à rappeler au groupe une question posée antérieurement à laquelle il n’a pas répondu.
- Le reflet-élucidation. Consiste à analyser le sens d’une intervention au niveau du vécu du groupe, c’est à dire de ce qui se passe ici et maintenant entre les participants, au niveau affectif.
En conclusion, les réunions-discussions bien conduites ont un double effet :
- elles permettent que les informations partielles, détenues par chaque participant, circulent et viennent accroître la somme d’information disponible. Ceci a pour effet de faire évoluer les systèmes d’opinions par la nécessité d’intégrer des informations discordantes.
- elles ont un effet d’éducation sociale sur les participants dans le sens d’un assouplissement, d’une écoute et d’une tolérance accrue de chacun par rapport aux autres.
Roger Mucchielli : La conduite des réunions, p. 73, 77, 80